Super heros malgré lui Philippe LacheauAprès avoir eu l’occasion de voir en avant-première le film Super Héros malgré lui au cinéma Pathé des Rives de l’Orne à Caen, j’avais envie de faire un article sur ce dernier. C’était loin d’être gagné d’avance ! En effet, malgré le fait que je sois particulièrement bon public pour un cinéma proche de celui des frères Farelly, j’ai longtemps eu des difficultés avec ce que proposaient Philippe Lacheau et sa bande. Je n’ai jamais vraiment compris pourquoi car l’humour potache, provocateur et même parfois vulgaire fait également partie de mon ADN de cinéphile.

Mais voilà, j’ai été agréablement surpris et j’ai finalement passé un bon moment avec Super héros malgré lui. La cinquième création de Philippe Lacheau, m’a, en partie, réconcilié avec la bande à Fifi. Après avoir moyennement apprécié entre autres, Babysitting et franchement eu beaucoup de mal avec son adaptation de Nicky Larson, ce film est la preuve qu’il ne faut jamais juger une production avant de l’avoir vue. Ce revirement valait bien la rédaction d’un article.

Le synopsis du film Super-héros malgré lui

L’histoire débute avec Cédric un comédien de seconde zone qui finit par enfin décrocher un premier rôle dans un film super-héros intitulé Badman. Un soir après le tournage l’acteur emprunte  la Badmobile, la voiture du film. Hélas, il est victime d’un accident et perd totalement la mémoire. En reprenant ses esprits, encore vêtu de son costume de justicier et entouré d’accessoires du film, il est persuadé d’être devenu Badman. Il se croit alors investi d’une mission ô combien périlleuse. Hélas pour Cédric, n’est pas justicier de l’ombre qui veut ! Va-t-il réussir ? Va-t-il retrouver la mémoire ? Tout l’enjeu est là !

 

Le contexte de la réalisation du film Super-héros malgré lui de Philippe Lacheau

Une parodie de film de super-héros français

Après avoir adapté Nicky Larson, Philippe Lacheau a donc choisi, avec Super Héros malgré lui, d’inscrire son 5eme film dans le registre de la parodie tout en restant dans le domaine de la « comédie action ». D’ailleurs, à mon sens, l’idée de départ de l’acteur qui tourne un film et qui perd la mémoire est assez voisin de ce que propose Jason Bourne. Ensuite effectivement le thème de super-héros joue à plein tout au long du film.

Parodie de film de super heros

Dans Super Héros malgré lui, il ne faut pas longtemps pour comprendre que c’est Batman qui est ici parodié. C’est plutôt bien trouvé car cela colle assez bien au fait que Cédric soit amnésique et qu’il continue assez longtemps à croire qu’il est un super héros. En effet, Badman et Cédric tout comme Batman et Bruce Wayne n’ont pas de super pouvoirs. Ils ne s’appuient que sur des gadgets et sur la maîtrise de techniques de combats.

Durant tout le film, on peut repérer plein de clins d’œil  plus ou moins cachés. Les fans de fans de comics et des films de Marvel et DC les remarqueront. Par exemple, ils sont dans les sous-titres, les arrière-plans, les noms, ou encore les enseignes. Des scènes du film sont également de belles références aux films de super-héros. Par exemple il y a le fameux baiser à l’envers du premier Spider-Man de Sam Raimi. Il y encore le moment où Cédric danse dans l’escalier, tout heureux d’avoir été choisi pour jouer le rôle de Badman qui est une référence au Joker, et à la chorégraphie de Joaquin Phoenix dans le film éponyme. Globalement, je trouve même que les séquences d’action portent assez bien la signature du langage visuel du cinéma d’action américain.  Dans Super-Héros Malgré Lui, les scènes de combats de Badman et les courses poursuites sont plutôt soignées.

Un film parodique au rythme et aux gags « cartoonesques »

Mais attention, il s’agit d’une parodie bien loin des standards d’un Christopher Nolan. Toutes ces références et ces plans ne sont là que pour être distordus. Je dirais même amplifiés pour s’en amuser et rendre les situations ridicules. Oui car finalement on a quand même affaire à un homme de ce qu’il y a de plus normal qui se prend pour un super-héros… Mon hôte du jour m’avait donné cette clef de lecture avant d’entrer en salle : Le côté cartoon du cinéma de Philippe Lacheau. Je crois qu’effectivement c’est le cas mais surtout c’est l’une des raisons qui m’a finalement fait apprécier Super Héros malgré lui.

Philippe Lacheau parodie super heros

Construit autour d’un scénario absurde, le film est ultra rythmé, les gags s’enchaînent presque frénétiquement. Même si je n’ai pas ri aux éclats à chaque blague, il faut être honnête et dire qu’il m’a très souvent (et plus que je ne l’aurais cru) fait sourire de bon cœur.

Le côté cartoon se retrouve tout particulièrement grâce à l’usage de nombreux gags visuels dans le film. On retrouve d’ailleurs dans leurs constructions une certaine parenté avec les films des années 80 de Francis Veber avec Pierre Richard tels que La Chèvre.

 

Les acteurs du film Super-héros malgré lui de Philippe Lacheau

C’est une partie où des interrogations demeurent encore chez moi au moment où j’écris ces lignes. Je serai sans doute moins complet qu’à l’accoutumée. J’ai du mal à appréhender si l’aspect mal dégrossi des personnages est fait pour rester dans la caricature et rester dans la veine du cartoon ou s’il existe un déficit à ce niveau. J’ai passé un bon moment donc je donnerai le bénéfice du doute à Philippe Lacheau et à sa bande. Les piliers de la bande à Fifi sont, bien entendu, présents et occupent des rôles majeurs dans Super Héros malgré lui.

Philippe Lacheau en Cédric devenu Badman

Philippe Lacheau campe Cédric le personnage principal du film. Au début du film, cet acteur de seconde zone est un peu le souffre-douleur de tout le monde. Par exemple, il se fait rudoyer dans la rue par un vieux qu’il n’a pas aidé. Candide à  souhait et avec peu d’amour-propre, il se fait allègrement manipuler par les autres. En devenant Badman, il tend vers le super héros tout en conservant son côté gentil looser. Et c’est ce qui fait le sel du personnage de Cédric.

Philippe Lacheau

Élodie Fontan en Eléonore sœur militaire badass

De mémoire, ce type de rôle est nouveau pour Élodie Fontan. Ici elle joue la sœur de Cédric. Ultra-sportive, elle a clairement un tempérament de guerrière et de véritable meneuse.

Tarek Boudali et Julien Arruti en Adam et Seb : potes un peu encombrants

Seb est clairement le pote looser de la bande. Il est complètement déconnecté du réel et encore plus en participant à des tests cliniques de médicaments pour se faire un peu d’argent. Ce sont d’ailleurs les effets secondaires de ces médicaments qui sont le cœur des effets comiques du rôle tenu par Julien Arruti.

Adam, l’autre pote de Cédric, que Tarek Boudali interprète, vit en couple avec  la mère de Seb. Adam joue avec excès son rôle de beau père vis-à-vis de Seb son pote, et donc c’est assez drôle . Cependant, il souhaite que Seb quitte la maison familiale. Pour ce faire, il monte un stratagème pour lui faire croire qu’Eléonore est secrètement amoureuse de lui. Les quiproquos sont alors nombreux et sources de moments très cocasses.

Chantal Ladesou en productrice sans scrupules

J’ai une affection toute particulière pour cette actrice, qui a quand même fait le cours Simon ! Dans Super Héros malgré lui, elle est génialissime dans le registre de la productrice odieuse et profiteuse. Elle n’apparaît que dans la scène d’introduction mais lance parfaitement le film. Cette séquence avec cette productrice sans scrupules est truculente notamment parce qu’elle égratigne gentiment le petit monde du cinéma français. Comme par exemple avec sa réplique  «Notre super-héros s’appelle Badman, et il n’a rien à voir avec Batman parce qu’il n’a pas de cape».

 

Mon avis sur le film Super Héros Malgré lui de Philippe Lacheau

Un humour transgressif qui fait du bien et presque salvateur

Adepte de l’humour des frères Farrelly et de films tels que Dumb and Dumber ou Mary à Tout Prix, j’aime l’humour transgressif. Même si je n’étais vraiment fans de ses premiers films, il faut reconnaître que j’ai toujours apprécié qu’il ose aller loin dans l’humour. Dans une époque où le politiquement correct s’impose jour après jour un peu plus; l’humour transgressif de Philippe Lacheau est à mon sens presque « résistant ». J’y vois un certain parti pris assumé dans l’humour avec ses gags transgressifs. Finalement, qui ose plus que lui dans la comédie en France ? Peut-être Dupontel dans un tout autre style, mais sinon ?

humour transgressif

Alors, effectivement cela ne plaît pas à tout le monde, ce n’est pas spécialement fin mais cela ne l’a jamais prétendu. Mais même si le rire est le propre de l’homme et qu’il est universel, l’humour ne l’est absolument pas. L’humour est finalement toujours relatif au vécu personnel, à la société à laquelle on appartient. Là où certains verront un film à vannes recyclées, je trouve que « Super-Héros malgré lui » est un sympathique antidote dans cette période particulièrement morose et permet un certain lâcher prise presque salvateur…

La vraie question du super héros français

Même si depuis la sortie sur Netflix du très réussi film de Douglas Attal « Comment je suis devenu super-héros », on ne se demande plus si il existe des films modernes de super-héros en France, la question mérite de s’y attarder.

En France, on s’est longtemps interdit de faire des films dans ce genre très spécifique et très américain. Bien entendu dans Super Héros malgré lui, le traitement du sujet est parodique, cependant en toile de fond c’est bien l’existence de Super-Héros Français qui est abordée.  Il est inscrit presque inconsciemment que les super-héros ne sont pas dans la culture française. Pourtant, pas le passé, des héros masqués ont existé en Hexagone mais ils sont d’une autre époque.

Sur la toile, c’est avant tout une question de budget et d’absence de personnages iconiques inscrits dans la mémoire collective. En France aujourd’hui, pour faire un film de super héros, il faut inventer de A à Z l’univers. Obligatoirement, le film ne bénéficiera pas du même niveau de notoriété que les personnages américains de Marvel ou de DC comics. La concurrence est rude ! Et pourtant nous avons en France de vrais talents, les génériques des films Marvel ou DC Comics en sont bourrés allant du designer à l’infographiste. J’ai l’impression, peut-être à tort, qu’en France on a toujours besoin de garder un côté second degré ou rigolade quand on aborde les super-héros à l’écran.

super heros français

Mais Xavier Fournier, spécialiste des super-héros et des comics, auteur de livres Super-héros, une histoire française et Super-héros français, une anthologie chez Huginn Muninn en parlerait sans doute bien mieux et peut-être même qu’il ne serait pas tout à fait d’accord.

Super Héros malgré lui : un film qui réussit à réunir fans et nouveau public

Avec ce cinquième film, il me semble que Philippe Lacheau a offert à ses fans ce qu’ils attendent tout en s’ouvrant à un public plus large. Le choix  d’utiliser l’univers n’est sans doute pas étranger à cela. Je trouve également que son histoire est mieux ficelée. Bien entendu on n’est pas sur du Michel Gondry et du Eternal Sunshine of the Spotless Mind. Cependant il me semble que (sans parler de maturité qui serait hors propos en parlant du cinéma du Lacheau) son style reste créatif et transgressif tout en donnant un peu plus de sens à son film. Globalement, la « touche frères Farrelly » qu’il n’avait – à mon sens- pas encore réussi à atteindre auparavant commence à poindre.

Certes, ce n’est pas parfait! Je ne l’inscrirai pas parmi mes films préférés, mais j’avoue volontiers  avoir passé un très bon moment devant cette comédie. Maintenant, charge à moi de revoir les films précédents de Philippe Lacheau pour savoir si c’est la clef de lecture « cartoon » était celle qui fait apprécier ses films ou s’ il y a un certain aboutissement avec ce 5eme film.